Vivra-t-on mieux dans la ville de demain si elle est pensée par les femmes?

La ville de demain devra répondre à des enjeux climatiques et écologiques. Elle devra aussi être plus axée sur le vivre-ensemble, plus solidaire. Une solution pour favoriser la mixité sociale pourrait être d’adopter une vision plus féminine de l’aménagement urbain. Celle-ci permettrait bien sûr d’ouvrir plus largement la ville aux femmes. Surtout, la cité s’en trouverait plus inclusive. Pour tous.

Virginie Rabisse Publié le 18/04/2021 à 10:22, mis à jour le 03/11/2023 à 16:35
Bâtir la ville de demain au féminin la rendrait-elle plus inclusive, plus solidaire, plus favorable à la mixité sociale? Photo Frantz Bouton

Chausser les lunettes du genre pour rendre la ville plus inclusive. C’est la proposition que l’on voit fleurir ici et là, à travers le monde – au Canada, en Espagne, dans les pays scandinaves… – et, plus récemment dans l’Hexagone. 

Marseille se veut "première ville féministe", Le Havre, "première ville non sexiste". Nos communes sont, elles aussi, de plus en plus nombreuses à afficher leur volonté de mieux tenir compte des femmes dans leurs espaces publics. Pourquoi? Parce que la mixité sociale et la solidarité sont des enjeux de la ville de demain.

"En France, constate Christine Voiron-Canicio, professeur de géographie à l’Université Nice-Côte d’Azur, spécialiste de la ville durable et de la résilience, la ville durable a été traduite par écologique. L’environnement a pris le dessus et certains fondamentaux ont été oubliés. Notamment, la thématique de la ville inclusive.

Pour répondre à cette problématique, la géographe niçoise estime qu’il faut une grande vision, qui enveloppe cette question. À l’instar, de l’urbanisme tactique, de l’urbanisme circulaire ou, pourquoi pas, de l’urbanisme au féminin. Un regard plus large. Plus inclusif. Plus solidaire aussi.

"L’écoféminisme commence juste à se préoccuper des territorialités genrées, réfléchit Thierry Paquot, philosophe de l’urbain et professeur émérite à Institut national d’urbanisme, mais j’imagine qu’il mettrait en son cœur le ménagement, du verbe “ménager” qui veut dire “prendre soin”. Il faut substituer à l’urbanisme de l’inhabitable, le ménagement des gens, des lieux, des choses et du vivant et je crois que les femmes et les hommes écoféministes en sont capables."

Le constat: la ville est neutre… au masculin

Mais, la ville n’est-elle pas neutre? "Neutre, explique encore Christine Voiron-Canicio, revient implicitement à un aménagement pour un usage dominant. Les villes ne sont pas volontairement faites pour les hommes, mais elles sont faites pour ceux qui travaillent, font du sport, sont en bonne santé." Dès lors, le regard neutre porté sur l'aménagement des villes conduit à invisibiliser une partie de la population et ses usages.

Le regard féminin sur l'urbanisme tient compte des plus fragiles, enfants ou senior. Photo Laurent Martinat.

Auteur en 2015 de Les Villes faites par et pour les hommes, chez Belin, le géographe Yves Raibaud ne peut qu’abonder. "La ville neutre, assure-t-il, est réellement masculine dans les usages, car ceux des femmes sont minorés. D’ailleurs, on le voit dans les réunions, dès qu’une femme parle des seniors, des enfants, ça n’intéressait personne. On leur répond que ce n’est pas une question d’intérêt général, mais d’ordre privé. L’intérêt général vu de la position dominante, c’est l’économie notamment."

Chris Blache, socio-ethnologue, cofondatrice et coordinatrice du think tank Genre et Ville, fait le parallèle avec la langue: "Quand on dit habitant, voisin, où sont les femmes? Elles sont comprises. Sauf que, du coup, quand on pense à un habitant ou à un voisin, on pense à un homme."

Dès lors qu’on invisibilise le sujet, tout ce qui n’est pas visible n’est pas compté. Chris Blache, cofondatrice et coordinatrice du think tank Genre et Ville

Veiller à ce que la ville durable ne creuse les inégalités

"La ville durable n’est pas qu’écologique, lance, à Nice, la professeure d’université Christine Voiron-Canicio. Il ne faut pas qu’elle le soit, sinon on laisse du monde sur le bas-côté." La géographe, pour qui "ce qui est durable doit être inclusif", prend l’exemple de la voiture: celle-ci ne peut pas être totalement évacuée des centres-villes au risque d’engendrer des laissés-pour-compte.

Le géographe spécialisé dans la question du genre, Yves Raibaud, ne dit pas le contraire. Dans un billet pour le journal du CNRS, il évoque cette question. "Alors que les femmes gèrent la plus grande partie des accompagnements, explique-t-il, leurs journées se trouveraient prolongée d’une heure, si elles ne pouvaient plus utiliser la voiture en centre-ville."

Ainsi, pointe-t-il du doigt une politique du vélo qui oublierait certains habitants. "La politique de vélo, oui, à condition qu’elle ne creuse pas aussi les inégalités, notamment avec les personnes âgées, les personnes handicapées." Pour celles-ci, "la voiture peut être un outil formidable''.

Yves Raibaud pose la question de la même manière s’agissant de l’éclairage public. "Le baisser? Oui, si on a une ville sûre à 100%!" Autrement dit, "il faut faire attention aux fausses bonnes idées". Le géographe ne rejette pas pour autant cette problématique. "À Vienne par exemple, note-t-il, on éclaire non pas les routes, mais les trottoirs." Il souligne aussi que "la dépense d'électricité d’un quart du réseau urbain avec des Led, équivaut à une soirée d’électricité dans un stade". Et de s’interroger: "Avant d’éteindre la ville pour faire des économies, ne faudrait-il pas éteindre les stades?"

Une piste cyclable mal conçue peut vite se révéler source d'inégalité, favorisant l'usage du vélo, mais laissant les piétions sur le bas-côté. Photo Luc Boutria.

Thierry Paquot s’intéresse aussi à la question depuis plusieurs années. Pour lui, "l’urbanisme est le moment occidental et masculin de la fabrication de la ville productiviste. Il ne prenait en compte que l’homme actif, solvable et en bonne santé. D’où des villes zonées livrées aux automobiles.

Les enfants et les femmes, mais aussi, les "inactifs" (chômeurs, retraités...) étaient systématiquement oubliés ! Thierry Paquot, philosophe de l’urbain

Mais comment, alors qu’elle semble ignorer la moitié de la population, la ville pourrait-elle se prévaloir d’être hospitalière pour tous? 

Vu sous cet angle, le changement de regard apparaît inéluctable. "La première chose, estime Chris Blache, c’est se poser la question, c’est acculturer à la problématique." Autrement dit, chausser ces fameuses lunettes du genre. D’abord pour admettre que, oui, l’espace public est sexué.

"Dès que l’on cesse de parler au masculin neutre pour parler au féminin, on voit l’organisation des rôles genrés", souligne Yves Raibaud, interloqué qu’on ne se soit pas aperçu de ça plus tôt. Et d’illustrer: "Comment peut-on dire qu’une ville est faite pour tous lorsque, le soir, seul un passant sur cinq dans la rue est une femme? Quand deux utilisateurs sur trois de structure sportive sont des hommes?"

Le géographe explique aussi que "la vie des hommes est moins plurimodale": "C’est statistique, lorsque l’on interroge les ménages. Les femmes gèrent 65 % des courses d’approvisionnement et 75 % des accompagnements des enfants et des personnes âgées. Cette domesticité entraîne qu’elles ont moins de loisirs. Une variable majeure que personne n’a trop envie de regarder en face, parce que la ville doit justement être celle du plaisir. Elle doit être sympa, plaisante pour les hommes.

"Les hommes occupent l'espace, les femmes s'occupent dans  l’espace", résume la coordinatrice de Genre et Ville.

Pourquoi un regard de femme ?

Ainsi, le regard des femmes tient compte de problématiques plus larges et donc de plus de monde. "La circulation des femmes dans la ville, c’est aussi les personnes à mobilité réduite, les seniors, précise Christine Voiron-Canicio, leur regard est plus représentatif de l’ensemble de la population que le regard masculin."

Les villes multiplient les parcours sportifs et autres city-stades. Des installations qui bénéficient principalement aux hommes: ils constituent deux tiers des utilisateurs. Photo Luc Boutria.

Dans la pratique, les femmes sont donc plus soucieuses des trottoirs trop hauts et des temps de passage piéton trop courts qui contraignent les déplacements des personnes âgées ou handicapées. Leurs regards se portent plus sur la question des assises dans l’espace public ou du manque d’éclairage dans certaines rues, conduisant à des stratégies d’évitement de ces lieux. Elles sont aussi plus sensibles aux questions de lumière, de végétation, de respiration dans la ville.

Impliqué dans des projets d’urbanisme du côté de Bordeaux, Yves Raibaud prend en exemple la conception de la nouvelle place Mérignac au cœur de la capitale girondine. "Là, les joueurs de boules prenaient toute la place. Au-delà de les déplacer, élus et architectes associés avaient pensé remplacer le boulodrome par un city-stade. Mais lors des ateliers de quartiers, les femmes présentes ont dit qu’il ne fallait ni l’un ni l’autre, parce qu’on n’aurait encore eu que des hommes. Elles ont préconisé un espace libre sur lequel on puisse organiser des brocantes, un bal…" En somme, se rassembler.

Les femmes préfèrent un espace public où tout le monde peut se retrouver sans équipement spécialisé. Yves Raibaud, géographe.

Plus près de nous, Jamila Ari a aussi pu constater, ce regard plus vaste. Directrice de l'association Femmes dans la cité, à La Seyne-sur-Mer, elle se souvient comment, en 2015, lorsque la cité Berthe a été réhabilitée grâce à l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, seul l’avis des hommes a été entendu lors des différents diagnostics. "La première chose qu’ils ont demandée, c’est plus de parking. Résultat, il y a peu d’espace pour les enfants. Ça, des femmes l’auraient mis en avant!

Pour cette Varoise, "le regard des femmes est différent, parce qu’elles ont plusieurs vies". Mais aussi parce qu’au-delà de leurs propres expériences, "elles récoltent les expériences des personnes de leurs foyers".

À La Seyne-sur-Mer, une marche exploratoire dans la boîte à outils

Dans son Manuel pour un aménagement inclusif et garant de l’égalité de genre, la Banque mondiale propose des solutions qui permettent de changer le regard des institutions, des hommes, mais aussi des femmes. Ça commence par une exploration de la manière dont les femmes vivent et utilisent la ville. Autrement dit des marches exploratoires. C’est ce à quoi avaient participé des femmes du quartier Berthe à La Seyne. "En 2018, la Ville avait répondu à l’appel à candidature de France médiation pour des diagnostics en marchant. Femmes dans la cité était alors l’association support", se souvient la directrice de l’association Jamila Ari. Quarante-deux femmes s’étaient portées volontaires.

"Après des réunions d’information, elles avaient établi une cartographie des lieux où elles allaient, de ceux qu’elles évitaient. Ça nous a permis de définir un parcours." Les exploratrices ont ainsi participé à deux marches: l’une de nuit, l’autre de jour. 

La première s’est portée sur l’aménagement, la végétalisation, les passages de trottoirs… "Il y avait des mamans avec des poussettes, une élue en fauteuil roulant", se souvient Jamila Ari. Elle lâche: "La marche de nuit, ça a été un autre monde. On a toutes été très impressionnées: on n’y a croisé aucune autre femme, il n’y avait quasiment pas d’éclairage…"

Les participantes ont ensuite produit un rapport avec leurs observations, présenté aux élus, aux représentants de la préfecture. Certaines demandes d'aménagements ont été prises en compte. "Les changements urbains les plus faciles à faire l’ont été, note Jamila Ari. Ces femmes ont eu un rôle d'experte.

Au point que, plus tard à l’occasion d’un fait divers sanglant dans la cité (un double meurtre en septembre 2018, Ndlr), les participantes ont été sollicitées. C’est à la suite de leurs observations que la tour du Gers, haut lieu du trafic de drogue à Berthe, a été murée.

Eclairage, passages piétons, taille des trottoirs... Les marches exploratoires sont des outils qui permettent de repérer les obstacles à l'usage de la ville par les femmes. Photo Jean-François Ottonello.

Dans les Alpes-Maritimes, Catherine Le Lan, ancienne maire de Vence et assistante sociale scolaire, est tout aussi catégorique quant à l’intérêt d’un regard plus féminin sur l'aménagement urbain. En 2019, alors encore première magistrate, elle avait organisé un débat sur l’aspect sexué de l’espace public, en partenariat avec Nice-Matin.

"C’est en écoutant les femmes qu’on apporte de la mixité sociale."  Une certitude qu’elle étaye par des caractéristiques socio-économiques. "En France, on a 27% de familles monoparentales, dont 80% sont des mères avec des enfants. Un tiers de ces familles vivent sous le seuil de pauvreté. Autre point: les personnes de plus de 80 ans sont en majorité des femmes.

Pour l’ex-élue, ne pas répondre aux usages de ces personnes, c’est les laisser sur le bas-côté. "Penser la ville pour les femmes, c’est la penser pour tous." En fait, explique-t-elle, "les femmes sont les expertes de l’urbanité d’usage, de l’urbanité vécue". Elle l’oppose à "l’urbanité de représentation, celle de ceux qui pensent face à celle de ceux qui font".

La représentation, c’est joli, c’est beau, ça fait plaisir. Mais on passe à côté des besoins d’une grande part de la population. Catherine Le Lan, ancienne maire de Vence et assistante sociale

Yves Raibaud théorise: "On a une géographie surplombante très masculine, qui consiste à faire des plans d’en haut. On ne rajoute le facteur humain qu’une fois qu’on a fait l’esthétique des lieux."

Pas de chasse à l’homme

Il n’est cependant pas question de bouter les hommes hors de la ville et de bâtir une cité où, à leur tour, ils seraient invisibilisés. Il ne s’agit pas non plus de remplacer une ville neutre masculine par une ville féminine. Plutôt de "déconstruire", explique le géographe. "C’est pour ça que les innovations sociologiques comme la sociologie de genre sont intéressantes: elle voit les choses dans les détails.

De toute façon, ajoute-t-il, "on n’a jamais vu un groupe de femmes proposer un équipement qui ne soit que féminin!". "Ce n’est pas parce qu’on est une femme qu’on va penser en femme, renchérit Catherine Le Lan. Et puis, circuler, stationner, ces questions que les hommes mettent souvent en avant, ce sont aussi des questions que les femmes se posent."

Chris Blache, du think tank Genre et Ville, rappelle ainsi que "l’urbanisme genré, c’est une approche plus globale, un regard décalé. L’idée, ce n’est pas, parce qu’il y a eu des espaces pour les hommes, de faire des espaces pour les femmes. Plutôt de regarder avec différents points de vue, sans binarité". 

 La ville de demain doit se faire avec tous, avec les différentes générations. Christine Voiron-Canicio, professeure de géographie à l’Université Nice-Côte d’Azur

À Vence, atelier et participation pour rendre la ville plus inclusive

Maire de Vence de 2017 à 2020, Catherine Le Lan avait observé sa ville au travers des lunettes du genre. Mais elle ne l’avait pas fait seule: l’édile avait aussi tablé sur la participation. Elle se souvient notamment du réaménagement de la cour de l’école Toreille-Saint-Michel. "En explorant, on a vu que quinze garçons jouaient au milieu et que tous les autres, surtout des filles, restaient autour." Ce constat a été fait par les classes, mais aussi des enseignants et les services techniques et les aménagements ont tenu compte des observations. "Désormais, s’enorgueillit Catherine Le Lan, on a une cour avec plein d’espaces de vie ¹."

Mais pour elle, la réussite la plus frappante de cette méthode à la fois féminine et participative, c’est la réfection de la place du Grand-Jardin. 2.000 m² de sable constituant la dalle d’un parking souterrain. "À part quelques boulistes et le public des Nuits du sud, tout le monde l’évitait. Nous avons eu l’idée d’en faire un espace partagé, végétalisé. Aujourd’hui, estime l’ancienne maire, la mixité est extra!" La place du Grand-Jardin de Vence est ainsi fréquentée par "des petites mamies, des enfants qui jouent, tous les âges et catégories sont représentés. La meilleure des preuves, c’est qu’au premier confinement, on a dû fermer la place tant il y avait de monde!".

Ce succès, revendique Catherine Le Lan, fait suite à des réunions, des ateliers, des marches exploratoires. "Pour que ça fonctionne, il faut y faire participer les habitantes, mais aussi un élu et un fonctionnaire", remarque-t-elle. Mieux, elle note que la réalisation d’une maquette "a donné les moyens à chacun de se projeter, ce qui a permis plus de mixité sociale".

Des ateliers participatifs ont aussi été organisés dans le cadre du projet Chagall, dont la livraison des 200 logements en plein cœur de Vence est espérée pour 2022 ou 2023. Les propositions faites par des femmes ont conduit à la modification du projet: "Un des bâtiments a été reculé et divisé par deux pour que la lumière rentre. Il y a des accès pour aller au parc, à l'école, un verger. Au centre, on a créé le centre d’animation de la vie sociale et associative."

1. À l’époque, le réaménagement de la place du Grand-Jardin n’a pas fait l’unanimité. Réduisant la jauge du festival des Nuits du Sud, il a cristallisé les oppositions qui reprochaient à Catherine Le Lan de négliger la culture.

Parmi les aménagements réalisés sur la place du Grand-Jardin à Vence, le choix d'un revêtement de sol qui permet à tous de circuler, de jouer, plutôt que des pavés, certes jolis mais peu praticables. Photo Frantz Bouton.

Pour certains, la non-mixité des explorations reste importante. Yves Raibaud considère qu’"elle est nécessaire si on veut connaître la ville par les femmes, les invisibles". 

Sa consoeur niçoise, Christine Voiron-Canicio, pense au contraire que "cette éducation doit se faire avec les hommes, parce que des regards différents peuvent finalement converger. C’est comme ça que les lignes bougent: il faut d’abord se rendre compte et ensuite comprendre, pour convaincre ceux qui ne voient pas le problème".

Une solution pour la mise en œuvre: le budget genré

Reste qu’une fois ce regard pris en compte, il faut le mettre en œuvre. Comment? Chris Blache et Yves Raibaud, habitués à travailler ensemble, ont une réponse commune. "Il faut qu’il y ait une volonté politique", lâche la première, tandis que le second assure que si tel est le cas, "en à peine dix ans, une ville peut être transformée".

Il illustre: "Alors que les équipements sportifs des villes sont utilisés surtout par des hommes, on pourrait dire que les femmes n’ont qu’à s’en emparer à leur tour. Mais il y a quelque chose qui ne colle pas là-dedans parce que les femmes aussi payent des impôts." Autrement dit, on bâti des structures que les femmes financent aussi, mais dont elles n’ont pas l’usage.

L’occupation de l’espace public par les femmes est un véritable enjeu: il faut que l’aménagement contribue à les faire venir. Jamila Ari, directrice de l'association Femmes dans la cité à La Seyne

Le géographe bordelais souligne ainsi qu’il faut se poser la question dans l’autre sens et se demander si tel ou tel projet urbain répond aux attentes de tous, y compris des femmes. Pour ça, il évoque les budgets genrés instaurés par les conseils municipaux de plus en plus de villes. "Ils permettent de veiller à ce que les équipements soient égalitaires."

"Une valeur ajoutée aux équipements, lance en écho Catherine Le Lan. L’argent public, c’est fait pour que ça serve à tout le monde."

Mais pourquoi dans nos villes des Alpes-Maritimes et du Var, aucune mesure de ce type n’a-t-elle encore été prise pour bâtir la ville de demain? Le think tank Genre et Ville, consulté par de nombreuses collectivités locales – villes, mais aussi département, métropoles, région… –, n’a par exemple jamais été contacté par nos institutions, confirme Chris Blache. Si elle n’avance pas d’explication à cet apparent manque d’intérêt pour cette vision, la socio-ethnologue constate que nous sommes "sur des territoires aux politiques plus conservatrices", même si, ajoute-elle, "on ne travaille pas qu’avec des villes de gauche".

"Rompre avec cet urbanisme est exigeant, concède le philosophe Thierry Paquot, il réclame du “cas par cas”, du “sur-mesure”, du “réemploi”...

D’autant plus, souligne Christine Voiron-Canicio à Nice, que si les "les institutions sont importantes, car elles peuvent opter pour des approches alternatives",  nos villes souffrent aussi, dit-elle, d’un excès de normes. "Il faut réintroduire de l’imagination là où l'aménagement repose sur la réglementation et non sur l'auto-organisation, où cet excès de réglementation nuit à l'adaptation." Où la représentation prime sur l’usage. Où le masculin neutre efface tous les autres.

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