Troubles du sommeil, perte de biodiversité... Pour réduire l'impact de la pollution lumineuse ces villes éteignent leur éclairage

La pollution lumineuse a des effets néfastes sur la santé, la biodiversité et la qualité de l'air. Pour réduire ces nuisances, des villes azuréennes comme Vence ou Grasse ont décidé d'éteindre les lampadaires en deuxième partie de nuit. Et à Marseille des adeptes du parkour, acrobaties urbaines, ont organisé une opération d'extinction des enseignes de boutique.

Sophie Casals Publié le 27/01/2021 à 18:00, mis à jour le 14/03/2022 à 17:21
Grasse a éteint son éclairage public dans les quartiers résidentiels, en 2e partie de nuit. Photo Ville de Grasse

Quel est le problème?

En ville, il ne fait jamais nuit. "En 20 ans, la quantité de lumière émise la nuit a presque doublé", pointe l'association nationale pour la protection du ciel et de l'environnement nocturne. Les lampadaires mais aussi les multitudes d'enseignes, de vitrines, bâtiments éclairés nimbent les ciels urbains d'un halo orangé.

Cette pollution lumineuse a des effets négatifs sur la santé. En effet, elle trouble le sommeil et le corps produit dans une moindre quantité la mélatonine. Une hormone essentielle car elle renforce notre système immunitaire et aide à lutter contre le développement de cancers et de tumeurs.
La lumière nocturne nuit aussi à la faune et la flore. "Les vers luisants, les chauves-souris, mais aussi les animaux qui ont des activités diurnes sont dérangés par la lumière dans leur moment de repos," explique Florent Bailleul, correspondant de l'association pour la protection du ciel et de l'environnement nocturne dans les Alpes-Maritimes.

De plus, des travaux conduits à Los Angeles par Harald Stark, chimiste, ont établi que la lumière des lampadaires détruit des composés chimiques nécessaires au nettoyage de l'atmosphère. La lumière nocturne augmente la production d'ozone dans l'air de 7 %.

Des actions de sensibilisation

Depuis près d'une quinzaine d'années, Florent Bailleul sensibilise les citadins mais aussi les élus à l'importance de protéger nos nuits pour préserver la faune et la flore.
Il organise des balades à la belle étoile (1) pour faire tomber les barrières psychologiques, la "peur du noir et le sentiment d'insécurité qui y est rattaché."

Pour les gens la lumière est avant tout synonyme de progrès, alors ils ont du mal à en percevoir les nuisances.

De plus, il invite les communes à réduire la pollution lumineuse et à s'engager en signant la charte de l'Association nationale pour la protection du ciel et de l'environnement nocturne.
Ces derniers mois, ce croisé de la nuit observe de nombreuses avancées dans les Alpes-Maritimes.

(1) Ces rendez-vous sont suspendus depuis la crise sanitaire.

Des villes éteignent leurs lampadaires

Vence éteint la moitié de ses lamapadaires après 23 heures, dans les quartiers périphériques. Une mesure source d'économies. Photo Eric Ottino.

Depuis le printemps, Grasse a décidé d'éteindre 30% des lampadaires, notamment dans les secteurs résidentiels et en périphérie, entre minuit et 5 heures du matin.
Une partie de la ville de Vence est aussi plongée dans le noir, de 23 heures à 5 heures du matin. "En 2012, nous avions été la première commune des Alpes-Maritimes à mettre cette mesure en place," rembobine le maire Régis Lebigre. Puis son successeur avait rallumé les lampadaires. Réélu en 2020, l'élu a rétabli et étendu le dispositif. Ainsi, depuis mi-décembre, près de la moitié des lampadaires sont éteints dans les quartiers périphériques de la ville.

Au niveau de la sécurité, les études sont claires, ça n'induit pas de recrudescence d'actes délictueux, ni davantage d'accidents.

A Grasse "les polices nationale et municipale n'ont pas constaté d'augmentation de faits de délinquance", note Annie Duval, élue en charge du dossier.

Saint-Jeannet, Falicon, Levens, Eze, Gattières, le Broc… petit à petit les villes et villages réduisent le halo lumineux. Demain, La Trinité, Carros, Cagnes-sur-Mer devraient suivre.
Si ces communes cherchent ainsi à préserver la biodiversité, elles réalisent aussi au passage des économies: près de 50.000 euros pour Grasse, 24.500 pour Vence.

A Nice, l'intensité lumineuse le long de la Promenade des Anglais a été réduite de moitié après 23 heures et des éclairages LED installés côté sud.

La pollution lumineuse a des effets néfastes, Nice a réduit l'intensité de ses éclairages chaussée Sud de la Promenade des Anglais. Photo archives Cyril Dodergny.

enseignes lumineuses: faire respecter la loi

L'autre source de pollution provient des enseignes lumineuses des magasins, dont l'allumage est réglementé. En effet, depuis le 1er juillet 2013, un arrêté régit les horaires d'extinction des feux des bureaux, vitrines et des illuminations de façades.

Les enseignes doivent éteindre leurs vitrines entre 1 heure et 7 heures du matin, ou alors une heure maximum après l'occupation des locaux. Or faute de contrôle, cette réglementation est loin d’être respectée à la lettre.
"Quand les villes ont des pratiques vertueuses, elles peuvent plus facilement aller voir les commerçants pour les sensibiliser", observe Florent Bailleul.

Pour susciter une prise de conscience, deux Marseillais, adeptes du Parkour (une discipline acrobatique en milieu urbain), ont décidé d'éteindre les enseignes de plusieurs boutiques des rues Saint-Ferréol et Paradis, le 18 janvier dernier.
Ils se sont filmés, s'élançant pour sauter jusqu'à la manette permettant de couper la lumière dans une expédition croisant écologie et acrobatie. Leur vidéo a cartonné sur les réseaux sociaux.

Leur vidéo a fait le buzz, et nos confrères de France-Bleu et  Brut les ont rencontrés. Yanis et Maxime expliquent s'être inspirés d'une initiative menée à Aix-en-Provence l'été dernier et intitulée "Opération Luciole".


Depuis plusieurs années maintenant, des collectifs comme Youth for Climate ou le Clan du néon organisent des opérations de ce type pour sensibiliser à la lutte contre la pollution lumineuse. 

L'éclairage des magasins, bureaux... correspondent à l'équivalent de la consommation de 300 000 ménages par an.

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